Étude de cas n° 1 de Digna
Développer une politique de PEAS :
l'expérience du Conseil de la Colombie-Britannique pour la coopération internationale
Développer une politique de PEAS : l'expérience du BCCIC
Cette étude de cas, élaborée par le Conseil de la Colombie-Britannique pour la coopération internationale (BCCIC) en collaboration avec Digna, vise à présenter les bonnes pratiques et les leçons apprises lors de l’élaboration d’une politique de prévention de l’exploitation et des abus sexuels. La présentation PowerPoint et les ressources qui accompagnent ce document donnent un aperçu complet du processus d’élaboration d’une politique spécifique de PEAS. Ils abordent également les normes minimales de fonctionnement de la PEAS du Comité permanent interorganisations (IASC) du point de vue de l’élaboration et de la mise en œuvre efficaces de la politique.
Leçons apprises d'un processus intégral d'élaboration de politiques
L'élaboration d'une politique sur la PEAS
Selon l’affiche sur la PEAS préparée par le BCCIC, l’élaboration d’une politique sur la PEAS est la première étape de la prévention de l’inconduite sexuelle. Pour mener à bien ce processus, les organisations peuvent trouver des conseils parmi leurs pairs qui ont mis en place des politiques de PEAS, chercher des exemples dans d’autres pays et mener des consultations avec des expert-e-s de la PEAS, des organisations de femmes et des groupes de la société civile dans les communautés dans lesquelles elles travaillent. À son tour, le BCCIC a mené une consultation multipartite comme toute première étape avant de procéder aux actions suivantes :
- Analyse des politiques;
- examen des dossiers;
- évaluation informelle des risques liés à la capacité organisationnelle;
- l‘engagement des jeunes; et
- approbation du conseil.
Des leçons apprises de ce processus
Voici quelques-unes des leçons apprises de ce processus :
- Prendre en compte le public et les cibles lors de la rédaction de la politique de PEAS afin d’en garantir l’accessibilité, la pertinence et l’adéquation;
- Garantir l’engagement de la direction et son alignement sur la mission et les principes de l’organisation, tout en tenant compte de la culture et des valeurs de l’organisation;
- Identifier un point focal, ainsi que des alliés au-delà de l’organisation; et
- Allouer des ressources appropriées pour un engagement significatif dans la politique et sa mise en œuvre.
Le processus d’élaboration de la politique de PEAS du BCCIC a également mis en évidence l’importance de la clarté de la terminologie et des concepts liés à la PEAS. Il s’agit de reconnaître que les différences individuelles et socioculturelles peuvent entraîner des interprétations différentes des concepts clés liés à la PEAS. Pour faire face à ces points de vue potentiellement divergents, un comportement positif et une communication interculturelle sont encouragés. Une autre leçon fait référence à l’importance de créer des espaces sûrs et inclusifs pour une discussion ouverte, compte tenu de la sensibilité des sujets liés à la PEAS. En outre, le BCCIC a recommandé de s’intéresser à des concepts tels que le “pouvoir” et l'”intersectionnalité”, ainsi qu’aux inégalités et aux barrières qui peuvent exister au sein des organisations de développement et des communautés dans lesquelles elles travaillent; autant de facteurs qui contribuent à accroître le risque d’exploitation et d’abus sexuels.
Le contexte juridique et politique
Une troisième proposition mise en évidence dans l’élaboration de la politique du BCCIC est le contexte juridique et politique, qui comprend les lois et règlements internationaux, fédéraux et provinciaux concernant les droits de la personne, la violence sexiste, les codes pénaux, entre autres. En prenant conscience du contexte juridique et politique à différents niveaux, il est important de considérer non seulement les règles et obligations canadiennes, mais aussi celles des pays où l’organisation travaille. Il est également essentiel de comprendre les responsabilités des organisations lorsqu’elles travaillent avec des partenaires locaux, notamment l’obligation de ne pas nuire, de protéger et de promouvoir les droits de la personne. Pour assurer la cohésion, il est recommandé d’obtenir des conseils locaux et de consulter des experts locaux.
Les dynamiques de pouvoir inégales
En termes de prévention, le processus de création de la politique, l’inspiration dans les codes de conduite d’autres organisations, l’évaluation et l’atténuation des risques vont au-delà de la sensibilisation et du renforcement des capacités. Une leçon tirée de l’expérience du BCCIC est l’importance de comprendre les dynamiques de pouvoir inégales, les normes et pratiques sociales discriminatoires, excluantes et nuisibles qui conduisent finalement à l’injustice sociale. Le BCCIC recommande d’examiner attentivement les causes profondes de la marginalisation et de la discrimination (telles que les préjugés, les normes et les pratiques patriarcales, coloniales et racistes), ainsi que les obstacles qui peuvent exposer certains individus et groupes à la violence en raison de leurs identités et positions interreliées. Le volet prévention des politiques de PEAS devrait permettre de réfléchir et d’évaluer ces dynamiques de pouvoir, ainsi que de prendre des mesures pour les transformer.
Des mécanismes de réponse
Une politique de PEAS doit également comprendre des mécanismes de réponse, notamment des procédures de signalement, de conduite d’enquêtes et de mise en œuvre des actions de résultat, qui doivent toutes être menées dans le cadre d’une approche centrée sur le survivant. Certaines leçons liées à la réponse font référence à la mise en place de canaux de communication et de mécanismes institutionnels efficaces, pour lesquels les organigrammes et les listes de contrôle sont des outils utiles pour cartographier et suivre le processus. D’autres leçons concernent la collaboration avec les partenaires locaux, l’accessibilité et la disponibilité d’un budget pour permettre l’enquête et la réponse. Le BCCIC recommande que, lors de la réflexion sur la réponse à apporter, des efforts soient faits pour prendre en compte les barrières interreliés auxquelles les survivants peuvent être confrontés lorsqu’ils signalent des cas d’abus et d’exploitation, en raison de leur identification de genre et de leur orientation sexuelle, ainsi que de leur race, de leur appartenance ethnique, de leur origine, de leurs capacités diverses, de leur statut socio-économique, etc. Les mécanismes de signalement ne seront efficaces que s’ils suppriment ces obstacles pour les survivants, et le soutien ne sera complet et centré sur les survivants que s’il s’attaque à certaines des barrières attitudinales, normatives et institutionnelles auxquelles sont confrontées les personnes laissées pour compte.
Des processus de suivi et de révision
Les politiques doivent également inclure des processus de suivi et de révision. Parmi les aspects à prendre en considération, il est à noter l’efficacité des politiques et des procédures, la rapidité des réponses, les ressources mises à disposition et la qualité de la communication du processus et des actions tant aux plaignants qu’aux répondants. L’évaluation et l’examen constants des politiques permettent de rectifier le tir et d’améliorer l’efficacité des procédures liées à la PEAS au sein des organisations.
Des ressources
Enfin, l’information est cruciale pour prévenir l’exploitation et les abus sexuels. En ce sens, la disponibilité des ressources, ainsi que le partage des connaissances, sont essentiels. Les documents d’évaluation de la PEAS et les boîtes à outils doivent être largement diffusés. Parmi ces ressources, on peut citer les codes de conduite, les accords de partenariat, les plans de formation annuels, les politiques de signalement, les listes de prestataires de services et les processus écrits d’examen des allégations.
Comment travailler avec les communautés locales, les membres et les partenaires lors de l'élaboration des politiques de la PEAS
La BCCIC réfléchit également à la manière de travailler avec les communautés locales, les membres et les partenaires lors de l’élaboration des politiques de la PEAS et du soutien aux autres organisations pour qu’elles élaborent les leurs. Les points saillants comprennent l’importance de la co-création dans l’esprit de la décolonisation, dans une perspective de respect mutuel et d’appréciation des diverses perspectives. L’accessibilité et l’inclusion doivent être prioritaires dans ces processus, de même que la pertinence et l’adéquation. Pour les membres du BCCIC par exemple, avoir des politiques simples qui peuvent être adaptées aux petites et moyennes organisations, et aux divers contextes de développement et humanitaires dans lesquels beaucoup travaillent, est un besoin urgent qui nécessitera un accompagnement et une prise en compte du type et de la portée des outils et des ressources qui sont actuellement partagés par le BCCIC et Digna.
Le BCCIC a mis sa politique de PEAS (y compris une version abrégée) et ses documents à la disposition du public pour consultation, ce qui est également une bonne pratique pour que d’autres organisations puissent la consulter et s’en inspirer pour l’élaboration de leurs propres politiques de PEAS.